Une nouvelle frontière de l’exploration humaine dans l’espace lointain exige une compréhension approfondie des adaptations physiologiques nécessaires pour les missions de longue durée. Une étude révolutionnaire, partiellement financée par la NASA et publiée dans *Cell Stem Cell*, a mis en lumière un défi crucial : les cellules souches humaines présentent un vieillissement accéléré dans les conditions de vol spatial. Cette découverte a des implications profondes, non seulement pour la protection de la santé des astronautes lors de voyages prolongés, mais aussi pour l’avancement de notre compréhension du vieillissement et des maladies sur Terre.
Dirigée par le Dr Catriona Jamieson, directrice du Sanford Stem Cell Institute à la faculté de médecine de l’Université de Californie, San Diego, la recherche détaille comment les cellules mêmes responsables de l’entretien et de la réparation du corps – les cellules souches – déclinent significativement en fonction lorsqu’elles sont exposées à l’orbite terrestre basse. Normalement quiescentes, ces cellules essentielles deviennent hyperactives en microgravité et sous l’effet des radiations cosmiques, épuisant rapidement leurs réserves d’énergie. Cet épuisement se manifeste par une capacité réduite d’auto-renouvellement et de régénération, une découverte cruciale pour les entreprises spatiales à long terme. En outre, l’étude a observé l’activation de séquences génétiques normalement dormantes, souvent désignées sous le nom de « génome sombre » ou d’éléments répétitifs, qui contribuent à ce stress cellulaire et au processus de vieillissement accéléré.
- Les cellules souches humaines subissent un vieillissement accéléré dans l’espace.
- Elles deviennent hyperactives en microgravité, épuisant rapidement leurs réserves énergétiques.
- La capacité d’auto-renouvellement et de régénération des cellules est significativement réduite.
- L’activation de séquences génétiques « dormantes » contribue au stress cellulaire.
- Ces découvertes ont des implications majeures pour la santé des astronautes et la recherche sur le vieillissement terrestre.
Méthodologie Innovante et Découvertes Clés
La recherche a été menée lors de quatre missions de ravitaillement de la Station Spatiale Internationale (ISS) opérées par SpaceX entre fin 2021 et début 2023. Les scientifiques ont employé une approche innovante, utilisant des bioréacteurs de la taille d’un téléphone portable pour héberger et surveiller en temps réel des cellules souches de moelle osseuse données par des patients ayant subi une prothèse de hanche. Un système d’intelligence artificielle intégré a suivi en continu l’état des cellules, révélant leur hyperactivité soutenue. Le Dr Jamieson a noté que cette réponse au stress est étonnamment similaire aux schémas observés chez les patients atteints de troubles préleucémiques, où les cellules souches montrent également des signes de crise et de vieillissement rapide.
Les implications pour la santé des astronautes sont significatives. Une exposition prolongée aux environnements spatiaux pourrait affaiblir des systèmes cruciaux au sein du corps humain. Comme le souligne Arun Sharma, biologiste des cellules souches au Cedars-Sinai Medical Center, de telles découvertes suggèrent que les missions de longue durée pourraient entraîner un affaiblissement des systèmes sanguin et immunitaire, augmentant ainsi les risques pour la santé. Luis Villa-Diaz, professeur adjoint à l’Université d’Oakland, souligne en outre que si ces découvertes mettent en évidence des vulnérabilités potentielles, elles fournissent également des directions claires pour le développement de contre-mesures visant à protéger les astronautes.
Double Impact : Exploration Spatiale et Médecine Terrestre
Au-delà des voyages spatiaux, cette recherche offre une perspective précieuse sur les processus biologiques fondamentaux. Les similitudes entre le stress des cellules souches induit par le vol spatial et des conditions comme la préleucémie soulignent le potentiel d’applications transdisciplinaires. Le Dr Jamieson estime que cet outil peut accélérer la recherche sur le cancer, offrant de nouvelles pistes pour comprendre et intervenir dans le vieillissement et le dysfonctionnement cellulaire sur Terre. Les résultats préliminaires d’études en cours offrent également une lueur d’espoir, indiquant que les cellules souches peuvent récupérer du vieillissement accéléré une fois qu’un astronaute est de retour sur Terre, bien que ce processus de récupération puisse prendre environ un an.
Bien que cette étude fournisse des preuves convaincantes du vieillissement des cellules souches dans l’espace, le domaine continue d’évoluer. Elena Kozlova, professeure à l’Université d’Uppsala en Suède, souligne que tous les types de cellules souches ne réagissent pas uniformément aux environnements spatiaux. Ses propres recherches sur les cellules souches de développement précoce en microgravité ont montré une augmentation des gènes associés à la croissance, suggérant que, dans des conditions spécifiques, le vol spatial pourrait même favoriser un état plus jeune dans certaines populations cellulaires. Cette perspective nuancée renforce la complexité des réponses physiologiques humaines à l’espace et la nécessité d’une recherche continue et diversifiée. De futures études sont déjà prévues pour enquêter sur des contre-mesures pratiques, y compris des médicaments potentiels et des outils prédictifs pour évaluer la résilience individuelle aux rigueurs du vol spatial.