Les dangers des injections dans les applications web
Les applications web, de par leur nature publique, sont constamment exposées à des millions d’utilisateurs, dont certains cherchent activement à exploiter les failles de sécurité. Cette réalité impose une vigilance constante pour garantir la protection des données et la continuité du service.
Aux origines d’Internet, les attaques par force brute, consistant à tester des combinaisons de noms d’utilisateur et de mots de passe, étaient très fréquentes. Des robots ou des personnes mal intentionnées tentaient inlassablement d’accéder aux applications en devinant les identifiants.
Bien que les attaques par force brute soient devenues moins courantes grâce aux politiques de mots de passe robustes, aux limitations de tentatives de connexion et aux captchas, les cybercriminels continuent d’innover. Ils ont découvert que les champs de texte des applications pouvaient être manipulés par l’injection de contenu inattendu, forçant ainsi l’application à exécuter des actions non prévues. C’est ainsi qu’est née la menace des attaques par injection.
Les attaques par injection ne se limitent pas à la simple usurpation d’identité. Elles peuvent également servir à révéler des informations confidentielles, à compromettre l’intégrité des données, voire à prendre le contrôle total d’un serveur. Ces attaques représentent donc un risque majeur non seulement pour les applications web, mais aussi pour les utilisateurs et les autres systèmes interconnectés.
L’injection de code : une menace omniprésente
L’injection de code est une forme d’attaque particulièrement répandue. Les pirates exploitent leur connaissance des langages de programmation, des frameworks, des bases de données ou des systèmes d’exploitation utilisés par une application web pour insérer du code malveillant via les champs de saisie. Ce code est ensuite exécuté par le serveur, ce qui permet aux attaquants de contrôler le comportement de l’application.
Ces attaques sont possibles lorsque les applications ne valident pas correctement les données saisies par les utilisateurs. Si un champ de texte accepte n’importe quel contenu, il devient une porte d’entrée potentielle pour les cybercriminels. Pour se prémunir contre ces menaces, les applications doivent limiter strictement les entrées autorisées, en contrôlant la quantité et le format des données ainsi que les caractères acceptés.
Identifier les vulnérabilités d’injection de code peut être relativement simple, en testant différents types de contenu dans les champs de texte. Cependant, leur exploitation peut s’avérer complexe. En cas de succès, les conséquences peuvent être désastreuses, allant de la perte de confidentialité à la compromission totale de l’application.
L’injection SQL : une menace pour les bases de données
L’injection SQL repose sur le même principe que l’injection de code, mais cible spécifiquement les bases de données. Les attaquants insèrent des scripts SQL malveillants dans les champs de texte. Ces scripts, une fois exécutés par la base de données, peuvent permettre de contourner les écrans de connexion, d’accéder à des données sensibles, de les modifier ou de les supprimer, voire d’effectuer des opérations d’administration non autorisées.
Les applications PHP et ASP sont souvent plus vulnérables à ces attaques en raison de leur architecture. Les applications J2EE et ASP.Net, quant à elles, sont généralement mieux protégées. Les conséquences potentielles d’une attaque par injection SQL sont considérables et ne sont limitées que par la capacité et l’ingéniosité de l’attaquant.
L’injection de commandes : un risque pour le système d’exploitation
Les attaques par injection de commandes, également dues à une validation insuffisante des entrées, se distinguent par l’insertion de commandes système plutôt que de code. L’attaquant n’a pas besoin de connaître le langage de programmation de l’application, mais doit maîtriser le système d’exploitation du serveur.
Les commandes système injectées sont exécutées avec les privilèges de l’application, permettant ainsi de consulter des fichiers confidentiels, de visualiser la structure des répertoires, ou de modifier les mots de passe. La protection contre ces attaques repose sur la limitation des droits d’accès système des applications web par l’administrateur.
Le Cross-Site Scripting (XSS) : une menace pour les utilisateurs
Le Cross-Site Scripting (XSS) se produit lorsqu’une application affiche les données saisies par un utilisateur sans les valider ou les encoder correctement. Cette faille permet à un attaquant d’injecter du code malveillant qui sera exécuté par le navigateur d’autres utilisateurs de l’application. Le code malveillant peut accéder aux jetons de session, aux cookies et à d’autres données sensibles, et même modifier le contenu des pages web.
Les attaques XSS peuvent être stockées (le code malveillant est enregistré sur le serveur) ou réfléchies (le code est inclus dans une réponse du serveur, par exemple un message d’erreur). Dans le premier cas, le code malveillant est exécuté à chaque affichage, tandis que dans le second, il est exécuté à chaque requête spécifique.
L’injection XPath : manipulation de données XML
L’injection XPath survient lorsqu’une application utilise les données fournies par un utilisateur pour créer une requête XPath, un langage permettant de sélectionner des données dans un document XML. L’objectif est d’altérer cette requête afin d’accéder à des données non autorisées, un peu comme l’injection SQL. En fournissant des données malformées, un attaquant peut modifier le comportement de la requête et extraire des informations sensibles.
L’injection XPath est possible sur toute application utilisant des données XML, ce qui rend cette attaque potentiellement automatisable et applicable à un grand nombre de cibles.
L’injection de commandes par email : une voie alternative
Cette méthode d’attaque cible les serveurs de messagerie et les applications utilisant des instructions IMAP ou SMTP générées à partir de données utilisateur mal validées. Ces serveurs, souvent moins bien protégés que les serveurs web, peuvent être plus vulnérables. En passant par un serveur email, un attaquant peut contourner les restrictions habituelles telles que les captchas et les limitations de requêtes.
L’exploitation d’un serveur SMTP nécessite un compte email valide pour envoyer des messages contenant des commandes injectées. Une fois la vulnérabilité identifiée, les attaquants peuvent exploiter le serveur pour envoyer du spam par exemple. L’injection IMAP, quant à elle, cible les applications de messagerie web, via des URLs contenant des commandes malveillantes dans la barre d’adresse du navigateur.
L’injection CRLF : manipulation des protocoles
L’injection CRLF consiste à introduire des caractères de retour chariot et de saut de ligne (CRLF) dans les champs de saisie de formulaires web. Ces caractères, bien qu’invisibles, indiquent la fin d’une ligne ou d’une commande dans certains protocoles internet comme HTTP, MIME ou NNTP. L’injection de CRLF peut permettre de rediriger les utilisateurs vers des pages web personnalisées ou même de déclencher d’autres types d’attaques par injection.
Cette attaque exploite les applications qui ne filtrent pas correctement les entrées des utilisateurs et peut avoir de lourdes conséquences sur la sécurité du site.
L’injection d’en-tête d’hôte : manipulation de serveurs virtuels
L’en-tête d’hôte est essentiel pour les serveurs hébergeant plusieurs sites ou applications web. Il permet d’identifier l’hôte virtuel auquel une requête doit être envoyée. En manipulant cet en-tête, un attaquant peut diriger des requêtes vers des hôtes virtuels non intentionnels et par conséquent, exploiter certaines vulnérabilités de l’application.
Cette attaque est couramment liée aux applications PHP, mais peut également être exécutée avec d’autres technologies de développement web. L’injection d’en-tête d’hôte peut servir de catalyseur à d’autres attaques, notamment l’empoisonnement du cache web. Les conséquences peuvent aller jusqu’à l’exécution d’opérations sensibles comme des réinitialisations de mot de passe.
L’injection LDAP : manipulation des requêtes de recherche
Le protocole LDAP est utilisé pour faciliter la recherche de ressources sur un réseau. Les requêtes LDAP contiennent des caractères de contrôle spéciaux qui peuvent être manipulés par des attaquants s’ils réussissent à les insérer dans une requête. Cette injection peut servir à modifier le résultat de la recherche et à révéler des informations non autorisées.
Comme pour d’autres types d’injection, la clé du problème est la mauvaise validation des entrées utilisateur. Si une application utilise le texte fourni par l’utilisateur dans une requête LDAP sans le filtrer, un attaquant peut récupérer la liste de tous les utilisateurs en y insérant simplement un astérisque.
Prévention des attaques par injection
La prévention des attaques par injection est une responsabilité partagée entre les développeurs d’applications et les administrateurs de serveurs. Tous doivent être conscients des risques liés à une mauvaise gestion des entrées utilisateur.
Les développeurs d’applications doivent mettre en œuvre les bonnes pratiques pour assainir les entrées utilisateur. Les administrateurs de serveur, quant à eux, doivent effectuer des audits réguliers pour identifier et corriger les vulnérabilités.